Le crématoire n’étant pas encore construit à Melk, un camion emmenait chaque semaine les morts vers celui de Mauthausen. En attendant, ils étaient jetés dans un caveau dont il fallait les sortir déjà en putréfaction, tout au moins durant les mois d’été. J’ai fait de ces « enterrements » horribles. Nous devions prendre à pleines mains, pour les mettre sur des brancards, grâce auxquels nous les remontions, les cadavres déjà verts et dans le ventre desquels grouillaient des vers. La sensation atroce de ce contact était encore accrue lorsqu’il s’agissait de phlegmoneux, dont les jambes, qu’il fallait saisir, étaient presque entièrement pourries. La dernière fois que j’accomplis ce lugubre travail, le tuyau d’évacuation des W.C. qui courait le long du plafond de ce caveau était crevé juste au-dessus du tas de cadavres au nombre de 50 environ. Le spectacle de ces morts maculés, à la lumière d’une lampe tempête est vraiment inoubliable.