Allemagne / Buchenwald - Dora
Légende
Vue aérienne du camp prise par les Alliés, avril 1945. DR
Voir Camp de Buchenwald
La naissance du camp
En mai 1936 Fritz Sauckel, Gouverneur de Thuringe, propose à Himmler d’implanter un grand camp de concentration dans sa province, camp qui accueillerait les nombreux prisonniers du centre du Reich jusqu’alors dispersés. Ce sera une vaste centrale concentrationnaire regroupant tout à la fois un camp pour 6 000 détenus, des casernes, et des villas pour les officiers supérieurs, un centre de formation pour les troupes, avec sa bibliothèque, son « club » et ses zones de loisirs : un zoo avec ours et singes, un centre équestre. Des ateliers de production industrielle emploieront les détenus.
En juillet 1937 les premiers prisonniers arrivent pour défricher un terrain boisé de plus de 40 hectares, situé sur le flanc nord de la Colline de l’Ettersberg, colline qui domine la ville de Weimar.
Le lieu est un choix réfléchi. Weimar fut un des hauts lieux de la culture allemande, celui où Cranach, Bach, Schiller, Goethe, Liszt ont vécu et créé. Mais Weimar est aussi la ville du premier congrès du Parti nazi, devenue un lieu de culte du national socialisme auquel Hitler lui même rendra visite une quarantaine de fois.
Se développant au fil des années, le camp, conçu rationnellement par l’architecte Kuiper, est entouré d’une vaste ceinture de barbelés électrifiés jalonné de 22 miradors et lui même est découpé en ensembles cloisonnés par des barbelés : « grand camp » et « petit camp », bâtiments de l’infirmerie, blocks des expérimentations, crématoire, ateliers de travail. Une place d’appel sépare l’entrée du camp des baraques (blocks) en pierre ou en bois qui abritent les détenus.
Avant la guerre
Les détenus qui sont conduits à Buchenwald sont ceux de l’Ouest et du Nord Ouest de l’Allemagne, ceux de Saxe, Thüringe, Hesse et de la partie Nord de la Bavière. Ce sont des détenus de droit commun mais aussi et surtout des détenus politiques condamnés pour leurs opinions. A partir de 1938 des juifs, notamment au moment de « la nuit de cristal », des tsiganes, des homosexuels, des Témoins de Jehovah, ainsi que des « Sans domicile fixe » sont également incarcérés au camp, la politique nazie visant à exclure définitivement du « corps national allemand » les « étrangers à la communauté ». Les premiers étrangers à être déportés à Buchenwald sont des antifascistes Autrichiens suivis en septembre 1939 par des Tchèques, deux pays annexés par le Reich.
La guerre
Après le début de la guerre et suivant son évolution, des personnes en provenance de toute l’Europe seront déportées à Buchenwald. Les premiers seront des prisonniers polonais regroupés dans un « camp spécial », simple enceinte de barbelés que les SS surnommeront « le chenil », et où ils mourront rapidement de faim et de froid.
Un millier de juifs de Vienne, arrivés à Weimar le 2 octobre 1939 sont également détenus dans les mêmes conditions, bientôt rejoints par d’autres détenus polonais. La plupart auront disparu en février 1940, quelques-uns par injection mortelle, premier assassinat de masse dans un camp de concentration. L’année 1941 voit les premiers malades et invalides emmenés pour être gazés au château de Sonnenstein, près de Pirna, en Saxe
En octobre 1941 les premiers convois de prisonniers soviétiques sont installés dans la partie ouest du camp. Amenés pour travailler dans l’usine de la Deutsche Ausrüstungswerke (DAW), une entreprise SS de menuiserie et métallurgie légère, dont la construction a commencé en 1940 sur la route de Weimar, ils sont rapidement assassinés d’une balle dans la nuque.
Fin 1942, l’administration du camp engage la plupart des détenus dans l’industrie de guerre. Des usines sont bâties à proximité du camp, et des camps extérieurs (Kommandos) sont créés pour fournir de la main d’œuvre aux usines d’armement, d’aviation, etc.
En 1943, l’arrivée des premiers convois de Français correspond à la création de nouvelles usines et notamment le camp extérieur souterrain de Dora près de Nordhausen où seront fabriquées les fusées V1 et V2
Fin 1943, les effectifs administrés par le camp sont passés à 37 319 prisonniers. Parmi eux se trouvent 14 500 Russes, 7 500 Polonais, 4 700 Français et 4 800 Allemands et Autrichiens. Près de la moitié d'entre eux se trouve dans les camps extérieurs. 3 862 détenus meurent en 1943 dans le complexe concentrationnaire de Buchenwald.
La guerre réclame de plus en plus de main d’œuvre, le nombre de déportés à Buchenwald augmente. En août 1944, Le camp lui même est désormais surpeuplé avec 31 491 détenus très souvent abrités sous des tentes faute de place dans les 67 baraques du camp. Les 64 Kommandos utilisent pour leur part 43 500 autres détenus.
La libération
Début 1945, les nazis, sous la poussée de l’Armée rouge, évacuent les camps de l’est, notamment Auschwitz. Une partie des prisonniers est dirigée vers Buchenwald dans des conditions marquées par l’épuisement, la faim et le froid. Buchenwald devient alors le plus grand des camps de concentration existant. Fin février, derrière les barbelés du camp principal et dans les 88 Kommandos s’entassent désormais 112 000 personnes, parmi lesquelles 25 000 femmes. En mars, sous la pression, à l’Est, des Soviétiques et à l’Ouest, des autres armées alliées, les Kommandos commencent à être évacués vers Buchenwald qui va alors compter 47 500 prisonniers.
Le 6 avril 1945 c’est l’évacuation de Buchenwald lui même qui commence. 28 000 détenus sont poussés sur les routes dans ce qui prendra le nom de « marches de la mort ».
Le 11 avril la 6e division blindée de la 3e Armée américaine atteint Buchenwald. Elle y trouve un camp intact dont la garnison SS a fuit et qui est désormais administré par ses détenus.
Dominique Durand
Camp
Camps annexes et Kommandos